Temple de Marib, Yémen, 2003.
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AVERTISSEMENT 1
Les deux images présentées sur cette page sont tirées du superbe livre de
Pascal et Maria Maréchaux, Yémen, ciel et terre, publié aux Éditions Hazan en 2003. Livre que vous pouvez acquérir dans toute bonne librairie pour environ 43 euros.
AVERTISSEMENT 2
Ces images ont été recadrées pour mettre en valeur l'ambiguïté formelle. Cette présentation ne respecte donc pas le format original de bien meilleure qualité.

 

En feuilletant trop rapidement le livre Yémen, ciel et terre, je crûs tout d'abord voir en cette image une sorte de paravent. Paravent de toile qui aurait pu abriter du vent de sable le voyageur du désert. Cette forme supposée de paravent a tout d'abord fait osciller mon regard entre deux interprétations contraires. Figé devant cet accordéon imaginaire, je n'arrivai pas à distinguer les arêtes saillantes des rentrantes. Ainsi, à choisir deux bandes accolées, mon regard hésitait perpétuellement entre convexité et concavité. Tous ceux qui s'intéressent un tant soit peu aux illusions d'optique connaissent bien ce phénomène propre aux figures réversibles et dont l'image la plus proche est le Dièdre de Mach (voir ci-dessous à gauche).
 

dièdre-de-Machx11c9293

 

En répétant cette figure huit fois, vous pourriez obtenir un croquis de la photo. Croquis incomplet en ce qu'il ne nous donne pas l'alternance des angles supérieurs et inférieurs, absence qui n'empêche nullement l'effet "paravent" évoqué plus haut. Si l'absence des angles inférieurs s'explique par la présence d'une déclivité sablonneuse qui nous masque les bases, celle des angles supérieurs est due à l'angle de vision qui veut que le sommet du pseudo paravent soit presque à hauteur de nos yeux. Nous retrouvons presque le même phénomène dans un dessin que j'avais réalisé il y a quelques années (voir ci-dessus à droite). En ce croquis, la ligne de faîte des volumes aplatissait sans aucun remords la volumétrie des bases, ce qui n'est pas le cas ici, car la présence marquée de la lumière et des ombres suffit à évoquer des saillants et des rentrants. Ainsi, nous aurions toujours là un paravent dont l'alignement horizontal des bases et des sommets aurait dû ou aurait pu, dans d'autres conditions de luminosité, aplanir les panneaux.
Mais l'oeil du photographe est allé beaucoup plus loin que le vôtre, et son point de vue est encore plus trompeur qu'il n'y paraît, puisque vous avez là les huit colonnes du péristyle du temple de
Marib. Huit colonnes que vous pouvez apercevoir dans l'angle supérieur droit de la photo aérienne du site présentée ci-dessous. Ainsi, ce n'est pas tant l'inefficace alignement équivoque des sommets qui doit nous retenir en cette image que l'hallucinant contact équivoque de contours photographié dans le réel. Personnellement, bien que connaissant cette photo depuis longtemps, je me laisse encore surprendre à chaque nouvelle vision : je commence toujours par voir un paravent en accordéon, avant que de me souvenir qu'il y a là huit colonnes alignées mais aussi et surtout séparées. Espacement que nous pouvons apercevoir au niveau de la colonne ébréchée, au beau milieu de cette construction illusoirement continue.
C'est ainsi qu'en 1992 j'avais réalisé un dessin prémonitoire de cette photo parue en 1996. Pourtant, bien que mon intention fût de représenter alors cinq colonnes illusoirement conjointes par leurs cotés et illusoirement aplaties par l'alignement de leur sommet, nul ni personne ne peut prouver qu'il n'y a pas là un simple paravent dont le sommet se trouve à hauteur de nos yeux. C'est ainsi que cette photo m'offre, en même temps que la prégnance irrépressible de son illusion, une nouvelle interprétation illusoire de mon dessin. Quant à elle, chacun sait qu'il suffit d'aller sur le site de
Marib et de se déplacer d'un mètre à gauche ou à droite du point de vue choisi par ce photographe subtilement pervers pour que la réalité univoque reprenne finalement et heureusement ses droits. Ce qui n'est pas le cas du dessin à l'équivocité sans fin : vous aurez beau vous déplacer autour de votre écran, le faire pivoter à gauche ou à droite, ou même le secouer de toutes vos forces, rien ne vous permettra de décider qui des colonnes contiguës, des colonnes disjointes ou du paravent dépourvu du moindre souffle d'air est la juste et bonne image.

 

Temple-de-Marib-2

 

 

 

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