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ANALYSE : "Croquis A1 du tableau 16 "

a. LA SUPERPOSITION INVERSÉE IMPOSSIBLE.

Comprendre l’impossible de cette figure demande d’en connaître les deux vues contradictoires. Pour cela, il suffit d’en cacher tour à tour les deux moitiés. Ainsi, à ne conserver que la partie inférieure des bases frontales, nous obtenons des masses distantes qui, de la plus grande à la plus petite, s’alignent de la gauche vers la droite, tandis qu’à masquer cette même partie, nous voyons des volumes contigus qui, du plus petit au plus grand, s’échelonnent vers le lointain. Une transformation plastique confirme ce constat visuel : en renversant le recouvrement des boîtes, nous passons d’une articulation impossible à une autre possible. Mais, si ces deux manipulations prouvent que cette figure est une superposition inversée, aucun écart à la norme de cette catégorie n’a pour lors été trouvé. Pourtant, lors du renversement de la superposition, quelque chose s’est passé : des volumes distincts et distants sont apparus. Ainsi, à la différence des autres superpositions ouvertes, que sont la Tripoutre inversée et le Cadenas ouvert, l’Emboîtement est une figure multiple. La présence de ces volumes peut expliquer le fait que l’Emboîtement soit une figure impossible-possible. Mais comment une figure multiple, et de surcroît ouverte, pourrait-elle accéder à l’impossible ?

Pour résoudre ce problème, nous devons affirmer la fermeture de l’Emboîtement. Malheureusement, dans la suite infinie de volumes que l’Emboîtement pourrait contenir, rien ne ressemble de prés ou de loin à une véritable fermeture, ou ne serait-ce même qu’à un simple bouclage. Pourtant, la boucle est bien là, qui, pour être reconnue, nécessite deux opérations mentales : admettre le contact des boîtes avec le sol, en même temps que la contiguïté des boîtes entre elles. Commençons par le contact au sol. Ce dernier semble présent, puisque nous pouvons appliquer à cette figure les effarements du Pont de B. (ci-dessous). Nous ressentons encore la présence illusoire du sol (premier effarement), grâce à une ligne imaginaire qui crée l’espace (second effarement) et assujettit les volumes (troisième effarement). Cette ligne suffit à rendre palpable la présence d’un sol invisible. En permettant le bouclage de la figure, le sol participe à l’impossibilité de cette figure. Pour en fournir la preuve, nous pouvons, tout comme nous l’avons fait avec le Pont, transformer l’Emboîtement en Tripoutre. La première partie du bouclage étant attestée par la matérialisation du sol, nous allons poursuivre en montrant le contact des éléments.

Pont-de-B

En fait, la contiguïté des éléments nous est fournie par la superposition. En effet, malgré le dessin marqué de leurs limites, leur absence de continuité logique et leur différence de taille, la simple superposition des volumes suffit à donner le sentiment de leur contiguïté. Mais pire encore, bien que nous sachions que ces volumes redeviendraient disjoints si nous renversions leur superposition, nous persistons à en faire un bloc uni. Difficulté supplémentaire, cette contiguïté est encore contredite par la ligne qui, en reliant les bases, semble répartir les boîtes au sol. Ainsi, nous considérons que cette figure est impossible, lorsque nous acceptons qu’une ligne illusoire équilibre l’apparent contact des volumes. Mais, si les mécanismes sont proches de ceux du Pont, des différences subsistent. Ainsi, la fuyante qui, en reliant la base des piles du Pont, mettait de la profondeur dans la frontalité de son tablier, aplatit maintenant l’échelonnement des volumes de l’Emboîtement. Différence anecdotique qui nous rappelle que les conflits d’échelonnement concernent toutes les directions de l’espace. Autre différence plus significative, alors que la masse du Pont était tordue par le conflit qui la traversait, l’Emboîtement ne voit pas remis en cause l’intégrité de ses volumes, mais leur relation réciproque. C’est qu’en passant des figures uniques aux figures multiples, un faux échelonnement s’applique plus à détériorer les relations spatiales, qu’à tordre les volumes.

Une superposition inversée ambiguë nécessite donc deux types de contact pour créer sa vision impossible. L’Emboîtement doit tout d’abord remplacer son absence de fermeture par le contact au sol de ses éléments. Puis, à la différence du Pont qui est constitué d’un volume unique et continu, il doit de surcroît faire oublier sa multiplicité par un contact entre ses éléments. Voyons maintenant le discours de ceux qui n’hésitent plus devant cette figure, après avoir pris la décision, somme toute sensée, d’éliminer le contact au sol.

b. LA SUPERPOSITION INVERSÉE POSSIBLE.

L’Emboîtement s’avère possible de deux manières différentes : la première suppose que l’on refuse le contact au sol des volumes, la seconde que l’on évacue l’idée même du sol. Commençons par la première en énumérant les raisons objectives qui devraient nous pousser à oublier un contact au sol que tant de raisons subjectives nous font imaginer.

Si, nous arrivons à oublier l’alignement des volumes, à comprendre que la ligne qui relie leurs bases résulte d’une coïncidence, nous réalisons que ces boîtes ne sont pas en contact avec le sol. Nous obtenons alors une construction réalisable, où les deux petits volumes, soulevés du sol, sont portés par le plus gros. Bien qu’elle ressemble beaucoup à l’interprétation possible du Pont, cette opération semble pourtant plus difficile à réaliser. La raison en est que les conflits d’échelonnement sont plus complexes dans l’Emboîtement. En effet, en cette figure, nous avons à dépasser une opposition de deux directions fortement opposées (un alignement vers la droite des bases et un échelonnement fuyant en profondeur vers la gauche des volumes), alors que celles du Pont offrait un écart moindre. De même, alors que le raccourcissement des piles s’accordait avec l’échelonnement fuyant du Pont, l’augmentation de la taille des boîtes vers le lointain le contredit. Il nous serait ainsi beaucoup plus facile d’imaginer que ces boîtes sont suspendues les unes aux autres, si elles s’éloignaient en diminuant de taille. Mais, ces remarques, qui pourraient être faites à certaines variantes du Pont, n’ont qu’une piètre importance. Car, rien de tout cela ne concerne la principale caractéristique de l’Emboîtement , la multiplicité de ses volumes, que nous allons maintenant nous empresser d’analyser.

Afin de contrebalancer l’hypothèse du contact au sol, cette figure multiple nous demande d’imaginer une contiguïté entre ses volumes. Cet effort supplémentaire pourrait très bien être la cause de nos difficultés à obtenir la vision possible de l’Emboîtement, car la contiguïté des volumes suppose que nous accordions une grande importance à un détail qui semble accessoire : leur superposition. Pourtant, une manipulation va nous permettre de montrer la difficulté qu’il y a à passer de cette superposition des volumes à une contiguïté des boîtes. En effet, bien que la figure n° 3 respecte la structure du modèle : un volume grandit en s’éloignant et sa base arrière s’aligne sur celle de la face avant, nous avons maintenant le sentiment de regarder une figure possible. Cette transformation de l’Emboîtement en figure unique, prouve que l’effort demandé pour rendre les volumes contigus est plus important qu’il n’y paraît au premier abord. Cette variante nous fait comprendre que la multiplicité des volumes de l’Emboîtement n’arrive pas à contre balancer l’alignement de leurs bases. Grâce à la continuité de sa masse, cette figure unique suffit à supprimer la prégnance de l’alignement, et de la vision impossible qu’il infère, pour nous faire accéder à une image possible et univoque.

Mais comment le contact entre éléments, que le Pont méconnaissait, peut-il nous faire passer de l’impossible au possible ? Le système est simple. Lorsque les deux contacts étaient simultanément admis, la fermeture totale de la figure qui s’ensuivait produisait de l’impossible, l’équilibre des deux contacts contradictoires ne permettant pas de choisir dans un sens ou dans l’autre. Mais si nous faisons l’économie du contact au sol en privilégiant le contact entre les éléments, cette figure maintenant entrouverte devient réalisable et donc possible. Ainsi, notre hypothèse des deux contacts, qui rendent les figures multiples impossibles, se trouve confirmée par la vision possible de l’Emboîtement. En effet, pour en arriver là, nous devons abandonner l’hypothèse du contact au sol pour ne conserver que celle du contact entre éléments. De même que si nous gardions le contact au sol tout en renversant le recouvrement des volumes, cette perte du contact entre les éléments entraînerait une deuxième lecture possible de l’image. Ces abandons alternatifs des contacts, qui, en ouvrant la figure, la font passer de l’impossible au possible, sont la preuve que le contact entre les éléments poursuit dans les figures multiples le rôle que le contact au sol joue pour les figures uniques.

Mais, dans la vision possible de l’Emboîtement, le contact entre éléments prime sur un contact au sol qui par son évidence implicite ne soulevait pas le moindre doute et ne posait aucun problème. Dans ce tour de passe-passe, nous abandonnons donc une évidence, le contact au sol, pour une construction aléatoire, le contact entre éléments, qui suppose de nombreuses et délicates supputations. C’est ainsi que s'il était justifié de reprocher au spectateur sa vision impossible du Pont, il semble légitime qu’il s’y accroche dans l’Emboîtement.

 

 

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Cliquez sur ce lien pour découvrir la double page du carnet où figure ce croquis. En feuilletant le carnet vers l'avant ou vers l'arrière, vous pourrez découvrir des variantes, qui, en tant que variantes mineures, n'ont pas été intégrées aux tableaux de la classification, et n'ont donc pas donné lieu à analyse.

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