|
Cette planche marque le passage du sémantique au plastique. Le dessin des pages précédentes obéissait au texte qu'il se contentait d'illustrer. En l'absence de texte, la polysémie de l'image aurait été telle que sa compréhension serait devenue difficile. Mais ici, nous pourrions supprimer le texte sans que la compréhension de l'image ait beaucoup à en souffrir. Sa présence sert essentiellement à souligner un détail de l'image qui serait peut-être, sans cela, passé inaperçu : l'inversion du recouvrement de l'appendice caudal du petit mammifère suffit à bouleverser l'espace de la case. Lorsque son appendice caudal est masqué, nous interprétons ce recouvrement comme un indice d'éloignement : . En revanche, si le même appendice recouvre la tête du grand bovidé, nous en déduisons qu'il est situé en son avant. Étant proche de nous, cet animal acquiert donc une taille minuscule : .
En cela, nous sommes toujours dans la problématique du glissement de sens. Mais, cette fois, à la différence de C'est bien joué, le glissement est totalement assumé par l'image, qui se suffit à elle-même pour opérer le passage d'une signification à l'autre. Ainsi, nous avons en haut un bovidé de taille normale en train de paître au loin, tandis qu'en bas, ce même animal devient un veau paissant tranquillement au tout premier plan. Par l'inversion du recouvrement d'un détail infime de l'image, un même élément peut apparaître comme étant lointain et grand ou proche et petit.
Cette planche fait partie d'une série qui cherche à atteindre le glissement ou la rupture du sens, grâce à un minimum de moyens plastiques. Le problème est ainsi posé : trouver la plus petite manipulation plastique qui puisse modifier le sens de l'image. Tandis que Poison donnait une réponse issue du champ de la langue, ces Vaches se contentent de travailler un détail infime de l'image.
RETOUR AU SOMMAIRE
RETOUR À L'ACCUEIL
|
|
