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Classification de l'espace de la langue
 L'ESPACE DU LANGAGE


AVERTISSEMENT
Le texte et le tableau qui vont suivre ont été réalisés à partir de la classification des images impossibles et ambiguës réalisée antérieurement (voir à la rubrique “Théorie” l’ultime et perfectible classification des figures impossibles et ambiguës). Il s’agissait d’appliquer aux paradoxes de la langue les principes et les catégories plastiques découverts avec les images paradoxales. Mais, l’application à un autre champ sémiotique (le langage) de la classification des figures impossibles et ambiguës (l’image), dont l’ultime version reste perfectible, ne va pas de soi. Ce nouveau champ étant par essence différent, les concepts et les catégories ont dû être aménagés.

INTRODUCTION

À lire un texte, nous sommes inclinés à croire aux deux dimensions de la langue, qui, parcourant la page de gauche à droite et de haut en bas, nous semble plane et linéaire. Mais cette page imprimée n’est qu’un simple support matériel, qui ne rend compte ni de la construction ni de la compréhension de la signification. Et ce n’est pas le schéma traditionnel de l’abscisse du syntagme et de l’ordonnée du paradigme qui peut remettre en question cette vision des choses. L’hypothèse que nous défendrons ici est que la langue, comme l’image, utilisent un espace tridimensionnel pour arriver au sens et à la signification.


I. LES TROIS AXES DE LA LANGUE

Le tableau ci-dessus reprend les trois aires traditionnelles du langage. Mais certains ajouts viennent perturber cet ordonnancement classique. Ont été en effet ajoutés aux trois axes de la langue les trois surfaces de l’image sur lesquels se répartissent les différentes figures impossibles et ambiguës. L’adjonction de ces surfaces (la figure, le fond, la figure et le fond) va nous permettre d’appliquer les principes et les catégories plastiques des images paradoxales aux paradoxes du langage.

a) L’AXE SYNTAGMATIQUE

L’axe syntagmatique, qui traverse latéralement l’espace de la langue en suivant le cours du mot, de la phrase et du texte, a ici été scindé en deux. Nous avons tout d’abord l’axe fléché. Celui-ci nous indique le sens du syntagme (sa direction) en même temps que son sens (sa signification). En le parcourant, nous avons accès à la signification par l’intermédiaire des différents signifiés que nous découvrons au fur et à mesure de notre lecture. Bien que le découpage du signe biface (recto signifiant, verso signifié) soit impossible, nous postulerons que cet axe privilégie le signifié (sachant que la présence d’un tracé graphique de base du texte est un pré-requis indispensable). Dans le champ de l’image, cet axe pourrait correspondre à ce qui fait figure, à savoir la forme qui, en se distinguant du fond, est perçue pour donner lieu à reconnaissance.
Mais, autour de cet axe, nous avons maintenant une surface. Cette dernière, qui sert de support matériel au signifié, concerne, encore le signifiant. Car la matérialité ne concerne pas seulement le tracé convenu du mot et de la phrase, mais peut aussi à travers les intervalles et la ponctuation, la graphie utilisée, le type d’alphabet ou le code choisi, la direction du texte et bien d’autres choses encore, donner lieu à ambiguïté et impossibilité. Ainsi, cette surface équivaudrait dans le champ de l’image au fond, à savoir l’espace d’où surgit la figure, plus qu’au tracé matériel de celle-ci, pourtant considéré habituellement comme étant le signifiant. Mais, dans une image, la totalité du support est signifiante : un vide exprime l’espace où évolue la figure, la position dans la feuille participe au sens..., et en cela nous restons bien dans le registre du signifiant.

b) L’AXE PARADIGMATIQUE

L’axe paradigmatique n’est guère modifié par la passage d’un champ sémiotique à l’autre. Les différents éléments d’un paradigme, formant taxinomie, peuvent venir se substituer à ceux du syntagme. En fait, le paradigme est absent matériellement de notre perception du texte ou de l’image, même si son existence conceptuelle, sa connaissance, reste indispensable à l’élaboration de la signification.
Dans le champ de l’image, nous retrouvons là le
Vase de Rubin. Lorsque nous percevons la coupe, nous faisons un premier choix paradigmatique, tandis que nous en faisons un deuxième en voyant les profils. Un premier problème est que si la loi d’exclusion fonctionne bien (un élément du paradigme ou l’autre), les deux éléments qui se succèdent n’entretiennent cependant aucun rapport logique entre eux (synonymie, ...) si ce n’est celui d’opposition, fonction apparemment suffisante pour constituer d’après certains linguistes l’axe paradigmatique. Autre écart, alors que l’image peut afficher simultanément les tracés des différents paradigmes, le langage se contentera d’un conflit conceptuel, répondant à la règle habituelle pour lui de l’absence (l’un ou l’autre). Mais cet autre pouvant prendre de nombreuses formes, je n'ai jamais apprécié le croquis de fonction mathématique appliqué au paradigme. Car, nous avons là des territoires (synonymies, homonymies, niveaux de langue,...) qui, en se superposant, se chevauchant ou s'ignorant, font que nous devrions avoir là des ensembles tridimensionnels en lieu et place de cette pauvre ligne verticale qui semble passer en revue et à la queue leu leu les différents paradigmes pouvant donner lieu à permutation.

c) L’IMPLICITE DU DISCOURS

L'implicite du discours est ici à considérer comme tout ce qui n'entre pas ou ne participe pas directement à la construction du texte. Plus que d'un axe, nous devrions parler de territoires puisque nous trouvons là : le contexte le métalangage, le sujet de l'énonciation, les niveaux discursifs... Ainsi, une sphère serait mieux à même d'exprimer l'implicite, sphère qui autoriserait et contiendrait les actualisations de l'explicite de tout discours possible.
Les premières classifications des images impossibles et ambiguës avaient un peu précipitamment fait entrer le référent dans leur organisation. Mais, depuis
L’ultime et perfectible classification de l'impossible et l'ambigu, les trois surfaces de l’image l’oublient très bien : la figure est associée au signifié, le fond au signifiant dans une acception élargie de son concept, tandis que la figure et le fond est liée au paradigme.
Mais, où peuvent donc bien être passées les ambiguïtés et les impossibilités du référent dans le champ de l’image ? En fait, elles en ont quasiment disparus. Comment expliquer cet état de fait ? En premier lieu, la mimesis dispense l’image d’une grande partie des contraintes référentielles que la langue se doit d’entretenir avec le réel. Pour simplifier, le dessin d’un cheval renvoie essentiellement à ce cheval là, tel qu'il a été dessiné, dans telle posture, avec ses maladresses et ses qualités. En second lieu, quelques images au référent impossible ou ambigu ont pour lors échappé à
L’ultime et perfectible classification ... : le Ceci n’est pas une pipe de Magritte ou, encore, certaines de ses mises en abyme. Nous verrons en revanche que le langage autorise nombre d’impossibilités associées au référent.
Mais, si le contexte référentiel est essentiel au système de la langue, nous ne devons pas oublier d'autres éléments qui, tout en n’étant pas présents de facto dans le discours écrit (l'en-dehors des axes syntagmatique et paradigmatique), participent immanquablement à son actualisation et sont tout aussi importants. Ainsi, nous verrons que le sujet de l’énonciation, le contexte, le métalangage, les niveaux discursifs... peuvent donner lieu à des paradoxes de la langue. C'est pour cette raison que le tableau présenté ci-dessus préfère parler de cet axe, plutôt de cette sphère, comme étant celui de : L'implicite du discours.
Alors que les situations paradoxales qui émanent de ces territoires sont bien connues des linguistes, les psychologues de la perception semblent les ignorer. Il est vrai qu’avec ces paradoxes nous quittons la forme, le signifiant et la matérialité (y compris conceptuelle) du signe, pour basculer définitivement dans le domaine du sémantique, du sens et de la signification.


II. L’ESPACE DE LA LANGUE

a) L’ESPACE

Ce tableau, hérité de la sémiotique, pourrait encore laisser croire que le sens se construit à partir de formules quasi mathématiques qui viendraient s’inscrire le long d’axes linéaires, que nous serions condamnés à suivre, dans un sens ou dans l’autre, afin d’élaborer une signification. Mais, si le syntagme, par définition contenu dans la hauteur et la latéralité du feuillet, investit maintenant la surface d’un rectangle au lieu de se contenter de son axe traditionnel, il faudrait encore remplacer les axes du paradigme et du référent par des espaces tridimensionnels.
Le paradigme est en effet constitué de classes d’éléments, qui peuvent donner lieu à taxinomie. Les combinatoires que l’on peut y trouver n’ont rien de linéaire. On peut ainsi aboutir, selon le type d’organisation choisi (en-dehors bien évidemment de celui de l’arbre), à des paquets, des regroupements à l’intérieur d’aires planes ou tridimensionnelles.
Le référent opère peu ou prou de même, en mettant le monde en catégories. Ce ne sont plus les éléments de la langue qui se prêtent alors à des combinatoires, mais les objets du réel. La catégorisation du monde passe par un découpage conceptuel, qui ressemble plus à la théorie des ensembles qu’à un agrégat de fonctions linéaires.

b) LES RELATIONS

Depuis Saussure, tout langage est de nature relationnelle et toute sémiotique est donc constituée de réseaux relationnels. À envisager les relations des axes susmentionnés, nous pourrions dire, en commençant par le syntagme, que les relations syntagmatiques de la langue peuvent être, tout au moins en partie, associées aux relations spatiales de l’image. C’est de ce postulat que provient l’obsession, ici manifestée, d’étudier les paradoxes de la langue à la lumière des trois principes plastiques découverts grâce aux images paradoxales : la superposition, le contact et l’alignement.
Mais cette obsession va jusqu’à appliquer ces trois catégories plastiques tant au paradigme qu’au référent. Ainsi, bien que la visibilité du paradigme ne soit que ponctuelle et que son aire soit absente et invisible du fait de son immatérialité, nous supposerons que la totalité des présences incongrues d’éléments paradigmatiques sur le syntagme peuvent être expliquées grâce à ces trois principes plastiques.
Enfin, le référent (en son acception élargie qui va du métalangage au sujet de l’énonciation) va subir le même traitement. Son absence obligée dans la matérialité du discours n’interdit en rien qu’une présence ponctuelle puisse être signifiée par des artifices : le métalangage permet ainsi de parler du discours ou de ses constituants pour atteindre ainsi des niveaux de langage habituellement masqués. Mais, les relations référentielles, que l’on pourrait croire identiques dans le champ de l’image et du langage en raison d’un référent commun, diffèrent de beaucoup. Encore une fois, cette situation peut être attribuée à la mimesis, qui, dans le champ de l’image, facilite la relation d’une forme à l’objet auquel elle renvoie. Situation singulière qui peut, peut-être, expliquer le nombre de paradoxes du langage que l’image ignore.

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE SUR LE LANGAGE

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