HIROSHIGE, estampe sur bois faisant partie des "Cent fameuses vues d'Edo", vers 1850.
HIROSHIGE, estampe sur bois faisant partie des "Cent fameuse vues d'Edo", vers 1850.
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PLANSITE-------SITEMAP---

 

Juillet 2013

Cette estampe peut tout autant évoquer une saison, une heure de la journée, la toilette du matin que l'attente. Pourtant, en son sein, un léger décalage graphique vient bouleverser l'espace de cet intérieur si quiet. À observer un détail, une inquiétude peut venir bouleverser vos certitudes. Sur le rebord de la fenêtre aux panneaux coulissants, un chat regarde au loin tandis qu'à droite, un bol et une serviette, attendent leur propriétaire.
Quatre lignes traversent l'image, quatre lignes marquant les rainures où viennent glisser la base des fenêtres aux carreaux de papier. Du coté du chat, ces rainures semblent posées sur l'épais rebord du mur. La plus grande partie du rebord étant située au-delà des panneaux, là où le chat est assis, pensif, tandis que l'autre, plus petite semble se situer en avant. Puis, votre regard glissant vers la droite, descend vers le bol, s'arrêtant sur la serviette. Quelque chose cloche. Là où tout jusqu'ici n'était que rebord plat et plan horizontal continu, devient cassé, plié, angulaire. Le drapé de la serviette tombe à la verticale juste après la rainure inférieure, notifiant ainsi au regardeur que le pan de mur vertical commence ici et non plus bas comme il pouvait le penser auparavant.
 

Détail de l'estampe de HIROSHIGE.


Cette ambiguïté spatiale n'est pas tant due à l'utilisation d'une perspective plus ou moins isométrique, comme dans l'estampe précédente, qu'à l'absence d'ombres. Ignorant ou indifférent aux ombres propres et portées, l'artiste japonais en arrive à laisser croire à un regard occidental qu'une surface d'une couleur uniforme, bien que rayée de quatre lignes, forme un plan d'un seul tenant. Par l'attention portée aux ombres, l'européen imagine l'angle du mur à la jonction du beige et du bleu outremer. La clarté du beige exprimerait la lumière rasante du soleil levant, tandis que le foncé de l'outremer en serait l'ombre. Mais, en dépit du dégradé céleste, le japonais préfère les lignes qui cernent, entourent et découpent les surfaces de l'image. Ainsi, pour lui, seul le cassé de la serviette peut donner une information adéquate quant à l'orientation de surfaces peintes d'une même couleur.

ADDENDUM 1
Une seconde illusion, qui relève encore de la couleur et de son rapport aux tracés, est perceptible en cette image. Un regard superficiel pourrait laisser croire que la base des fenêtres est dépourvue de carreaux de papier. Le mur et les carreaux de la rangée inférieure étant recouverts d'une même couleur, nous pourrions imaginer l'absence de papier. Là encore, les lignes permettent de lever l'indécision sur la nature de ces surfaces à la destination incertaine. La base de la fenêtre recouvrant deux des quatre lignes formant la rainure où viennent glisser les panneaux, nous sommes amenés à penser que les carreaux inférieurs seraient, eux-aussi, de la couleur du muret. Mais n'allons pas si vite et regardons du coté de la cartouche rouge située à droite. Ici manque le meneau vertical qui devrait séparer les deux premières colonnes de carreaux. Nous n'avons donc là ni mur, ni carreaux, mais la base d'une fenêtre, qui, ormis les carreaux de papier, est entièrement constituée de montants, meneaux et panneaux de bois, qui, pour leur plus grand malheur, sont de la même couleur que le sommet du muret qui les porte.
ADDENDUM 2
La torsion d'un plan peut être perçue dans
L'assassin menacé de Magritte. et une miniature moghole. C'est ainsi qu'en de nombreuses cultures et à diverses époques, nous pouvons retrouver, mais pour des raisons différentes, ce raté de la représentation.

 

 

WEBOGRAPHIE
http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Hiroshige,_Asakusa_ricefields_and_torinomachi_festival,_1857.jpg
HIROSHIGE Utagawa, Asakusa ricefields and torinomachi festival, ukiyo-e, gravure sur bois, 1857.
Gravure faisant partie du recueil intitulé
Cent fameuses vues d'Edo.

 

BONUS
Votre travail consistera à chercher en cette toile un plan, qui bien que traversant l'image, peut être percu comme frontal à gauche et fuyant à droite.
VALADON Suzanne, Boîte à violon, huile sur toile, 1923, Musée d'Art Moderne, Paris.

Valadon, "Boite à violon", 1923.

 

 

 

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