THÉORIE |
"Les trois points de vue non génériques sur le monde" |
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Notre système perceptif est ainsi fait que nous croyons voir la réalité du monde en ce que les formes que nous percevons correspondent tant à nos attentes qu’à nos connaissances. Mais, faute de posséder un répertoire mental de chaque élément du monde perçu sous toutes les coutures, nous percevons des formes génériques, à savoir des formes dont l’aspect général suffit à nous les faire reconnaître sans qu’il soit besoin d’en connaître la multitude des occurrences particulières ou à en posséder l’infinité des perceptions possibles. Malheureusement, toute forme peut donner une image d’elle qui ne correspond pas à sa réalité conceptuelle ou perceptive. C’est ainsi que nous pouvons percevoir des images non génériques d’éléments connus. Ces images nous apparaissent alors comme étant absurdes, impossibles, ambiguës ou inconnues. En cela, les figures ambiguës sont des images non génériques du monde : une des branches de l’alternative visuelle ne pouvant correspondre à la réalité de la forme, par définition univoque. LE TABLEAU DES TROIS POINTS DE VUE NON GÉNÉRIQUES
Ce tableau montre que deux volumes perçus sous trois angles successifs offrent trois points de vue non génériques qui correspondent aux trois catégories plastiques de l’ambigu. Ces deux cubes présentent en effet une superposition équivoque, un contact équivoque et un alignement ambigu selon l’angle sous lequel on les regarde. Afin de montrer cela, la moitié supérieure du tableau (vue d’avion) présente un plan de la position des deux cubes et du trajet opéré par le spectateur, tandis que la partie inférieure (vue frontale) reprend les trois visions successives du spectateur telles qu’il les perçoit du sol. À l’emplacement n°1, le spectateur est en face de deux cubes dont les contours se superposent exactement, alors que l’un est incliné vers l’avant et l’autre vers l’arrière. Nous avons là les deux visions du Cube de Necker (vue frontale n°1), mais qui, ici, se répartissent sur deux cubes distincts. En l’absence de repères spatiaux (sol, ombres propres, ombres portées) leur parfaite superposition fait croire au spectateur qu’il est en présence d’un cube unique et équivoque.
FIGURES MULTIPLES, FIGURES UNIQUES Voilà les trois étapes visuelles qui nous font découvrir les trois principes plastiques à l’origine des représentations spatiales ambiguës. Je ne saurais expliquer la raison de ce cheminement continu qui nous fait passer d’une équivoque à l’autre, mais les lois de la géométrie dans l’espace devraient être capables de mettre en équation ce trajet surprenant.
Malheureusement, si les points de vue non génériques des figures uniques sont bien connus, je n’ai pas trouvé le cheminement qui, autour d’une seule et même forme, permettrait d’obtenir trois équivoques différentes et successives. Ainsi, un cube ordinaire peut donner lieu à alignement ambigu (figure gauche) et à superposition équivoque (figure droite). Le problème est que le contact équivoque réclame une figure unique complexe, qui doit être constituée de plusieurs blocs pour aboutir à une contiguïté incertaine (figure ci-dessous à gauche). Il reste donc à trouver la forme unique complexe, qui, vue sous trois angles différents, donneraient à voir les trois catégories de l’ambigu. Il me semble que la figure ci-dessous à droite, qui sous cet angle présente un alignement équivoque, pourrait convenir à ce propos.
NOTA-BENE En déambulant récemment sur la Coulée verte (hiver 2008), j'ai photographié les mêmes conduits de cheminée à partir de points de vue successifs différents. Ces perceptions figées du réel semblent non seulement confirmer la théorie qui vient d'être définie précédemment mais l'élargissent aussi aux trois dimensions de la réalité. Ainsi, en suivant ce lien Les trois ambiguïtés d'une déambulation, vous pourrez, peut-être, mieux accepter ce qui, pour lors, ressemble encore à l'élucubration tout droit sortie du cerveau d'un obsessionnel qui tente de ranger le monde qui le dérange.
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