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ANALYSE : "Croquis B1 du tableau 35 "

Le Trapèze (fig. B1), ainsi dénommé pour nous souvenir de sa forme géométrique enveloppante, s’attaque tout autant à l’orientation qu’à l’échelonnement de ses volumes. Le conflit d’orientations se nourrit des deux directions antagoniques auxquelles obéit le volume central. En effet, cette masse qui s’éloigne au sol, lorsque nous respectons son tracé perspectif, se redresse à la verticale, si nous acceptons l’alignement de son arrière avec le sommet des volumes qui l’entourent. L’ensemble du volume central, en sa continuité et en sa totalité, semble alors basculer d’une direction à l’autre. À vouloir concilier ces deux directions antagoniques, ce volume subit une torsion inconcevable, et, en cela, nous avons bien un conflit d’orientations. Paradoxalement cette torsion ne joue que dans un sens, puisque les deux volumes latéraux ne semblent pas attirés vers le sol. Quoiqu’il en soit, l’alignement des sommets de cette figure multiple tend à réunir à l’intérieur d’un plan unique et continu des masses qui se dirigent dans des directions différentes. Nous retrouvons ainsi le principe de continuité de l’orientation évoqué avec les figures précédentes. À la différence près qu’en l’absence matérielle du support des figures A1 et A2, nous sommes contraints de recréer mentalement le plan qui assure la continuité nécessaire à l’élaboration d’une orientation commune aux différents volumes.

Mais, le Trapèze fait aussi l’objet d’un conflit d’échelonnements. Car si l’acceptation simultanée des alignements des bases et des sommets aboutit à une version tordue et impossible, leur acceptation successive le rend ambigu. En cette figure, deux échelonnements successifs de la forme centrale sont en effet possibles. Nous pouvons tout d’abord considérer que le bloc central est posé au sol, et en déduire que l’alignement des sommets, l’arrière du volume central avec le sommet des volumes latéraux, relève de la simple coïncidence. Mais, à accepter ensuite ce même alignement, nous voyons le volume central s’élever à l’horizontale jusqu’au sommet des volumes latéraux. En cette deuxième occurrence, c’est l’alignement des bases des trois volumes, qui, faute de signification spatiale particulière, devient une pure coïncidence. Ainsi, sans que nous ayons à modifier sa direction, le volume central peut s’échelonner à deux hauteurs différentes dans l’image. Nous retrouvons alors la discontinuité nécessaire à l’échelonnement, puisque le volume central est situé dans un plan horizontal alors que les volumes latéraux conservent leur direction verticale. Mais, qu’il porte sur les orientations ou sur les échelonnements, le conflit spatial nécessite des alignements équivoques. Nous allons donc essayer de comprendre les mécanismes des différents alignements sur lesquels reposent ce double conflit.

L’alignement des sommets des volumes latéraux avec l’arrière du volume central suffit déjà à produire de l’ambiguïté. En nous demandant de poursuivre des lignes situées par un effet du hasard sur un axe commun, la colinéarité nous pousse à placer le fond du volume central à la même distance ou à la même hauteur que le sommet des volumes latéraux. Selon l’interprétation que nous en faisons, cet alignement discontinu modifie l’orientation ou l’échelonnement du volume central. Mais, à des degrés moindres, d’autres lignes sont encore impliquées dans ces conflits. Ainsi, le bord vertical droit du volume central a deux fonctions. À la manière de la Monopoutre aplatie, l’alignement continu de sa face avant et de son dessus a pour effet d’aplatir le volume. Cela permet d’atténuer la désagréable impression que pourrait produire un volume, qui, bien qu’étant supposé dressé à la verticale, montrerait encore son assise. Ensuite, le parallélisme qu’entretient cette ligne avec le bord vertical gauche du volume de droite facilite le relèvement à la verticale du volume central. Dans ce cas, au lieu d’utiliser la prolongation des lignes des sommets, l’alignement emploie le parallélisme des lignes des côtés. Ainsi le Trapèze associe trois types d’alignements, qui, malgré leur nature différente, concourent tous au même résultat. Abordons alors leurs effets.

Que l’alignement des sommets des volumes latéraux avec l’arrière du volume central amoindrisse l’espace de l’image, n’est pas surprenant. La Tripoutre alignée réunissait déjà ses deux barres divergentes, en raison de l’alignement de leurs côtés. Mais, que des lignes verticales parallèles puissent modifier l’orientation des volumes, est un phénomène inédit. La verticale du côté gauche du volume de droite, en se dressant au-dessus du sol, entraîne avec elle la verticale du volume central, qui, parce qu’elle appartient à un côté fuyant latéral, devrait pourtant s’éloigner au sol. Si nous admettons que des horizontales alignées voient leur échelonnement disparaître grâce au principe de colinéarité, l’absence de toute continuité possible oblige ces deux parallèles à en passer par un autre principe de la Psychologie de la Forme. Ainsi, pour comprendre comment des lignes aux orientations différentes peuvent se retrouver sur un même plan, nous devons convoquer le principe de “similarité”. Ce dernier stipule que des éléments possédant des similitudes, qu’elles soient de taille, de forme ou de direction, tendent à se regrouper pour former des structures. Ce qui est ici le cas, puisque, du fait de l’identité de direction de son tracé à la surface de la feuille, une parallèle contamine bien l’autre quant à son orientation dans l’espace de la figure.

Mais, en-deçà de leurs effets sur l’espace de cette figure et des principes visuels qui les réunissent, les tracés du Trapèze permettent de retrouver les ambiguïtés de lignes du tableau n°19 de la rubrique "Théorie". Ici les horizontales peuvent tout autant s’élever dans les airs quand elles appartiennent aux sommets des volumes latéraux, que s’éloigner au sol lorsqu’elles représentent le fond du volume central. La verticale du côté gauche du volume de droite monte vers le ciel, tandis que celle du côté droit du volume central s’éloigne au sol. Enfin, les obliques s’élèvent dans les airs à la manière du côté droit du volume de gauche, ou s’éloignent au sol comme le côté gauche du volume central. Seules les obliques fuyantes et inclinées sont absentes de cette figure. Mais, toutes ces lignes, qui jusqu’ici superposaient leurs orientations contradictoires à l’intérieur des figures uniques ou multiples, peuvent maintenant les répartir sur les parallèles des figures multiples. Car si la colinéarité permet d’attribuer une même direction à des lignes divergentes qui semblent se poursuivre, la similarité est capable d’assigner une même orientation à des lignes, tout aussi divergentes, malgré leur apparent parallélisme. En ce sens, qu’il soit par colinéarité ou similarité, l’alignement peut être défini comme un parallélisme équivoque de lignes : parallélisme réel d’échelonnements superposés ou parallélisme illusoire d’orientations divergentes.

 

 

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