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"Escaliers pour vous casser la figure" |
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Novembre 2011 UN MILIEU INCERTAIN
DES ESCALIERS IMPOSSIBLES PERSONNELS UN ESCALIER TRIANGULAIRE Ces deux croquis personnels se contentent de reprendre, en la simplifiant à l'extrême, la structure de l'Escalier impossible de Penrose. Ici encore, trois éléments orientés dans trois directions antagoniques de l'espace suffisent à créer une représentation perspective d'une apparente impossibilité spatiale. Car, nous retrouvons, avec cet Escalier triangulaire, différentes possibilités de construction dans le réel évoquées à la page précédente.
1) La première solution consiste à rompre l'impossible et apparent contact du croquis gauche. Le croquis droit présente ainsi une rupture, qui n'est ni la plus logique, ni la plus attendue. En raison des tracés visibles, la coïncidence de contiguïté la plus plausible consisterait à unir le coté droit du palier inférieur avec la base de la première contremarche. Cette solution permettrait encore de conserver les quatre parties de l'Escalier de Penrose, au lieu d'aboutir à une pseudo et maladroite Tripoutre ouverte. Mais, peu importe, la solution dessinée permet de comprendre que le faux contact donnant lieu à impossibilité peut se situer même où on ne l'attend pas. Ainsi, une rupture pourrait être opérée en chaque millimètre du croquis gauche, afin d'aboutir à une construction dans le réel de son dessein. Malgré tout ce que j'ai pu dire, le croquis de droite n'a pas été conçu pour représenter la possible construction d'un escalier dit impossible. À l'époque, je m'intéressais à l'écart plastique minimum pouvant séparer l'impossible de l'ambigu. Ainsi, dès le départ, ce croquis a été pensé comme étant une construction équivoque. En cette image, un alignement équivoque pose le long d'une même ligne imaginaire les bords de la première contremarche avec l'épaisseur de l'extrémité du palier supérieur. Le palier supérieur semble ainsi renvoyé et rabaissé au niveau de la première marche. Si, en un premier temps et de ce point de vue particulier, la construction peut être perçue comme étant impossible, nous comprenons vite que cette situation est due à une simple coïncidence d'alignement de contours échelonnés dans l'espace. Dans le réel, un déplacement d'une dizaine de centimètres vers la gauche ou la droite modifierait le point de vue de telle manière que l'alignement plastique serait rompu, supprimant ainsi la possible vision d'une forme circulaire et continue et, en cela, impossible. UN ESCALIER DE FAILLE En raison de la présence d'une faille dans la croûte terrestre, ce nouvel escalier impossible sera appelé Escalier de faille. Le croquis gauche présente un escalier reliant deux territoires, d'une même hauteur apparente, séparés par un précipice. Un escalier ne pouvant relier que deux plans horizontaux situés à des hauteurs différentes, eux-mêmes conjoints à un plan vertical commun, la situation semble relever de l'impossible. En dépit de ce constat, de nombreuse solutions s'offrent à nous pour résoudre cette apparente invraisemblance. Pourtant, comme tout regardeur lambda et pressé, nous nous arrêterons aux réponses les plus simples, celles qui viennent plus ou moins spontanément à l'esprit, sans aller jusqu'à imaginer la possibilité d'une anamorphose ou de toute autre technique complexe.
1) Pour que cette escalier soit possible et conserve sa fonction : l'alignement équivoque. 2) Pour que cette escalier soit possible sans conserver sa fonction : le contact équivoque. 3) Pour que cette escalier soit possible et conserve, qui sait, sa fonction : la superposition équivoque. Pour conclure, il est à noter qu'en ces deux images, une seule ligne suffit maintenant à marquer un écart entre l'impossible et l'ambigu. Bien que ces deux représentations d'escalier puissent être réalisées de diverses manières dans le réel, le croquis droit, en raison de la présence d'une limite supplémentaire, facilite la croyance de sa possible construction. L'IMPOSSIBLE DES ESCALIERS PONTS Bien que l'objet emblématique des représentations spatiales impossibles soit l'escalier, nous allons aborder les ponts. Car, si un escalier impossible renie la progression en hauteur de ses marches, le pont pourrait refuser le trajet en profondeur de son tablier. Mais, que peut-il bien se passer lorsque la profondeur d'un pont à traverser est confrontée à la hauteur d'un escalier à monter ? Sur cette base, les deux croquis présentés ci-dessous semblent impossibles en ce qu'ils opposent la hauteur progressive de blocs conjoints à la profondeur régulière des espaces qui les séparent. Nous parlerons à leur propos d'Escaliers Ponts. Pourtant, ces images ne se distinguent guère des escaliers précédents puisqu'ils utilisent, eux-aussi, le contact et la superposition équivoques pour en arriver à ces illusoires impossibilités de la représentation de l'espace. - L'Escalier Pont de gauche semble plus proche des ponts que des escaliers, tant la partie droite du croquis montre les trois espaces à franchir avant que d'arriver au bloc le plus éloigné dans la profondeur suggérée du feuillet. Pourtant, lorsque nous portons notre regard vers la gauche, les blocs, qui étaient distants et échelonnés, redeviennent conjoints, au point de former une escalier de géant. Nous avons là un bel exemple de contact équivoque. En cette moitié gauche, l'arête verticale de chaque contremarche rejoint l'angle supérieur de la marche qui le précède. Le Y ainsi formé semble continu et nous n'arrivons pas à imaginer la séparation de ces deux tracés. La contiguïté plastique et matérielle des lignes est ici plus forte que la possibilité d'une simple coïncidence visuelle de contact qui serait due à un angle de vision particulier. Pourtant, cet effort ne devrait pas être bien grand, car, à revenir du coté droit, nous retrouvons les mêmes Y. Et là, les contiguïtés apparentes n'entravent en rien la vision de blocs séparés ! Pour expliquer cet écart, je ne vois que la proximité des ponts dont la reconnaissance formelle serait ici plus forte que les contiguïtés plastiques.
- L'Escalier Pont de droite penche, quant à lui, du coté de l'escalier en ce que trois plans inclinés successifs tentent de nous conduire au bloc le plus élevé dans l'espace du feuillet.. Mais, ici encore, à déporter notre regard, tout change : dans la droite du croquis les blocs conjoints s'écartent les uns des autres pour s'échelonner à l'horizontale dans la profondeur de l'espace. Cet échelonnement est en grande partie dû à un alignement équivoque qui, du fait de la maladresse du tracé, n'est pas aussi rectiligne, et donc aussi efficace, qu'il devrait l'être. Les bords droits des sommets des blocs alignent leur trajectoire sur une fuyante commune. Cette concordance des trajectoires laisse imaginer une profondeur, qui renie la progression en hauteur des plans inclinés. Enfin, à la manière du croquis précédent, nous retrouvons un alignement identique à gauche du croquis, qui, paradoxalement, n'a pas la même efficacité. Nous pouvons, là encore, supposer que la prégnance et la proximité des plans inclinés en arrive à reléguer l'alignement à un rôle subalterne. En ces deux croquis, nous retrouvons un conflit de la hauteur et de la profondeur. Ce conflit est inhérent à toute représentation perspective. La faille des systèmes perspectifs (qui concerne principalement les perspectives parallèles et les vues en plongée) réside dans le fait que les deux dimensions de la représentation, du papier, doivent prendre en charge les trois dimensions du réel, la réalité. C'est ainsi que la hauteur d'un élément dans la feuille peut tout autant signifier son éloignement dans la profondeur que sa hauteur au-dessus du sol. Situation qui pourrait expliquer la sur-représentation des escaliers et autres plans inclinés dans le domaine des figures impossibles. Mais, le conflit plastique de la hauteur et de la profondeur ne reflète sans doute pas le cheminement des processus visuels.
La réunion des deux croquis précédents donne lieu à l'image ci-dessus. En combinant les deux impossibilités supposées, cette nouvelle figure accumule de tels handicaps, que sa construction dans le réel semble, pour lors, bien impossible. Il suffirait pourtant de bien peu de choses pour qu'elle devienne réalité. Nous pourrions utiliser le principe du contact équivoque dont la problématique a été abordée avec l'Escalier de faille. Pour cela, des arêtes devraient être ajoutées aux extrémités supérieures des plans inclinés et des passages horizontaux, afin que tout un chacun puisse imaginer une coïncidence illusoire et passagère du contact des plans. De même, nous pourrions nous servir de la superposition équivoque afin d'envisager l'anamorphose de certains tracés. En ce cas, les arêtes horizontales des blocs reliés par les plans inclinés et les passages n'auraient d'horizontales que le nom. Ces lignes, qui, de notre point de vue, semblent rectilignes et horizontales, seraient courbées de telle manière qu'elles puissent assurer le contact des blocs à gauche, en même temps que leur séparation à droite. Quant à l'alignement, je n'ai pas trouvé de solution qui permettrait de montrer la constructibilité de cette image en jouant sur l'alignement. ENCORE D'AUTRES ESCALIERS IMPOSSIBLES ET PERSONNELS Vous n'en avez pas encore fini avec les escaliers à descendre dignement et les marches à monter sans tituber. Si ce n'est que la possibilité de ces constructions sera plus évidente pour le regardeur lambda. Pour le reste, nous allons retrouver, en ces différents croquis, le conflit plastique de la hauteur et de la profondeur. Ainsi, les extrémités d'un même bloc, pourront, selon le contexte, être compris comme s'élevant, d'un coté, au-dessus du sol ou s'éloignant, de l'autre coté, dans la profondeur de l'espace. De même, nous allons retrouver les deux principes plastiques qui organisent le conflit de ces deux dimensions : le contact et l'alignement équivoques. Mais, si le contact construit ordinairement la hauteur et l'alignement induit en général la profondeur, nous verrons que les rôles ne sont pas si tranchés qui peuvent s'inverser.
Avec les deux croquis ci-dessus, nous allons pouvoir étudier l'échange des rôles entre contact et alignement.. Ainsi, à la manière du dessin précédent, le croquis gauche présente trois blocs soudés de telle manière qu'apparaît à gauche un véritable escalier dont les marches conjointes s'élèvent peu à peu dans la hauteur de l'espace. En revanche, à droite de ce même croquis, la diminution régulière de longueur et l'alignement des arêtes latérales supérieures semblent disjoindre ces blocs, en les échelonnant au sol dans la profondeur de l'espace. Le croquis droit oppose, quant à lui, un alignement vertical gauche qui empile les blocs les uns au-dessus des autres, tandis qu'à droite, leur apparente contiguïté les dispose en escalier qui, tout en les élevant au-dessus du sol, les fait progresser dans la profondeur de l'espace. UN ESCALIER APLATI Courage, je vois la fin.
Même si alignements et contacts sont souvent associés et qu'il est parfois très difficile de trouver le principe qui préside à la mis en place de l'ambigu et de l'impossible, nous voyons que l'alignement supérieur des marches contredit l'ensemble de la construction qui, en son absence, donnerait l'image d'un escalier ordinaire. Ainsi, en masquant de la main la partie supérieure gauche du croquis, cette image redevient normale et ordinaire . La page suivante, lorsqu'elle sera prête, devrait vous offrir des exemples d'escalier impossibles ou ambigus que l'histoire de l'Art a eu à connaître au cours des siècles et des cultures.
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