Cageot, Budapest, printemps 2008.
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PLANSITE-------SITEMAP----

 

Le marché est terminé et un commerçant a laissé un cageot en plastique sur le pavé de Budapest. Au vu de la photo, vous pourriez penser, Sherlhock Holmes de comptoir, Maigret de bistro, Rouletabille de grande banlieue, que ce commerçant là était perclus de rhumatismes, à force de biner, été après été, ses champs de paprika. Paysan, qui, pour cette juste et bonne raison, aurait inventé un support métallique afin que la terre des cageots et du pavé des villes soit moins basse que celle des champs et des piments.
Mais, un lecteur, qui, comme vous, a depuis longtemps été confronté aux contiguïtés et alignements illusoires, ne peut être trompé par une ombre : l'ombre, suffisante et juste, du cageot en plastique, portée au sol par le soleil d'une matinée printanière.
Il est vrai que nous sommes habitués à ce que les ombres aplatissent, allongent ou déforment les volumes qui sont à leur origine. Pourtant, ici, nous en arrivons à croire qu'un volume d'ombre illusoire porte un volume de plastique réel. Comment expliquer cet écart à la perception habituelle que nous avons des ombres ? À l'évidence le point de vue doit participer à l'illusoire présence de ce volume inexistant. La photographie aurait été prise un mètre à gauche ou a droite que nous serions revenus aux ombres communes qui détruisent l'objet qui les fonde.
Mais, en dépit de ce que nous avons pu dire, l'alignement équivoque ne semble pas être le mécanisme plastique à l'origine de cette illusion. Car aucun contour de l'ombre ne vient prolonger de manière rectiligne les bords du cageot réel. Bien au contraire : leurs tracés divergent. De la même façon, le contact de l'ombre et de l'objet n'explique rien, puisque la seule présence du tracé noir suffirait à évoquer, à elle seule, un volume. Ne reste donc plus que la superposition équivoque pour comprendre et expliquer l'illusoire volumétrie de cette ombre. Il faut se rendre à l'évidence, du point de vue où nous sommes placés, un véritable cageot plastique ou métallique noir renversé sur le sol aurait pu prendre la place de cette ombre.
Que les ombres puissent exprimer des superpositions équivoques n'est pas nouveau. Ainsi, l'article concernant
La toute première anamorphose montre que toute ombre, lorsqu'elle est perçue sous un angle particulier, permet de retrouver la forme originelle de l'élément qui l'a suscitée. Et sans avoir besoin de recourir à la théorie, il vous suffira de revenir à la Poubelle, qui, étant isolée de l'objet qui la fonde, permet de mieux comprendre que, par le jeu de la superposition équivoque, l'ombre se suffit à elle-même pour produire une seconde image : l'illusoire volumétrie de son graphisme aplati.

 

 

 

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