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En cette autre vue du Havre, qui, d'un point de vue plastique, n'a rien à voir avec le Balcon, le parallélisme n'est pas illusoire. Ces deux formes blanches conservent en effet un écart constant et réel. Le problème est ailleurs : alors que la plupart d'entre vous perçoivent des poteaux métalliques s'opposant à l'envahissement de quatre roues, nous avons là des bandes caoutchoutées chargées de délimiter les emplacements du stationnement des deux roues. Voilà donc le problème : comment pouvons-nous voir des poteaux dressés à la verticale, là où il n'y a que bandes fuyantes collées au sol ? Ces deux surfaces parallèles se dirigeant dans une commune direction, l'alignement équivoque n'est donc pas en cause. En fait, chaque bande caoutchoutée supporte, à elle seule, une orientation ambiguë. Nous sommes en cela dans la catégorie des figures uniques, qui utilisent principalement la superposition équivoque pour mettre en place des orientations spatiales ambiguës. C'est qu'en chacune de ces deux bandes se superposent deux directions antagoniques. En supposant l'existence de poteaux métalliques, une première hypothèse dresse chaque surface blanche à la verticale vers le ciel. La seconde, qui préfère voir des bandes caoutchoutées posées au sol, dispose ces mêmes surfaces blanches sur un plan horizontal, dans une direction fuyante. Le moyen le plus simple de résoudre cet antagonisme des orientations est de modifier notre point de vue. Ainsi, un simple zoom arrière (voir photo ci-dessous à gauche) suffit-il pour que l'orientation spatiale de ces bandes ne soit plus équivoque .
Il n'en reste pas moins que ces deux orientation contradictoires, par une projection artificielle à la surface de la rétine ou du papier photographique, semblent se superposer. Afin d'apprécier l'équivocité des orientations de lignes, vous devriez consulter le tableau n° 19 qui traite de l'ambiguïté de leur direction. Bien qu'incomplet, puisqu'élaboré il y a déjà plusieurs années, ce tableau montre qu'une seule et même ligne tracée à la surface de la feuille peut suivre deux ou même trois orientations contradictoires dans le réel. Pour comprendre cela, nous allons voir comment cette ambiguïté trouvée dans le réel peut apparaître à l'intérieur d'une représentation. La toile de Antonio Pacheco datée de 1615 (ci-dessus à droite) présente presque exactement la même équivoque de directions que la scène aperçue au Havre (lire l'analyse de la toile de Pacheco). Là encore, nous avons le sentiment que le bord gauche du plateau de table, en dépit de son orientation horizontale connue, se dresse à la verticale. Mais ici l'équivoque de la situation diffère tant au niveau plastique qu'au niveau de sa résolution. Si le bord gauche de la table est déjà ambigu, à lui seul et en lui-même, il n'en reste pas moins qu'il est aidé par le parfait alignement qui unit sur un axe commun le drapé tombant vertical au bord fuyant du plateau. Nous avons bien là une superposition équivoque (les deux orientations apparentes de la table), mais aussi un alignement ambigu (le trajet de la nappe qui se poursuit et prolonge le bord de table). Mais, en cette peinture l'équivoque des orientations ne dure guère. C'est que la reconnaissance formelle aidée en cela par notre connaissance d'un monde logique et fonctionnel veut que nous supposions des plateaux de table à l'horizontale plutôt que verticaux. En cela, il est beaucoup plus facile pour cette table que pour ces bandes de rester horizontales, puisqu'en ces surfaces blanches deux fonctions contraires viennent s'affronter, qui font jeu égal. NOTA BENE
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