|
NÉCESSAIRE RAPPEL DES BASES THÉORIQUES À L'AIDE D'UN CROQUIS BASIQUE
Nous aurions dû commencer cette série de pages par ce petit rappel, mais égaré par tous les dénivelés, déclivités et autres plans inclinés, qui s'éloignent des règles de base de la diminution de taille, nous avons paré au plus pressé. Maintenant que nous avons à débattre de l'inéluctable et insurmontable conflit de la hauteur et de la profondeur qui se présente à nous dès qu'il s'agit de représenter les trois dimensions du réel sur les deux dimensions d'un support, nous sommes obligés de revenir aux bases
- Plus un élément est loin, plus il semble diminuer de taille. - La ligne d'horizon, lorsqu'elle est visible, est l'endroit le plus éloigné de l'image. - Plus la ligne de base d'un élément se rapproche de la ligne d'horizon, plus cet élément est loin. - Tout ce qui vient d'être dit ne s'applique pas aux éléments placés dans le ciel.

NE CONFONDEZ PAS CE QUI S'ÉLÈVE ET CE QUI S'ÉLOIGNE
Cette image, réalisée à partir d'un croquis de la page 64 du carnet 1988-1989, résume la problématique de l'ensemble des figures ambiguës reposant sur une équivoque ou une impossibilité des relations spatiales. Deux lignes brisées s'affrontent. La première, celle de la fleur, s'élève dans la hauteur de l'espace en trois tronçons obliques qui rétrécissent au fur et à mesure de la diminution réelle de la tige. La seconde, celle de la route, semble s'enfoncer dans la profondeur de l'espace, en raison de la diminution apparente des tronçons. En raison de leurs similitudes, chacune de ces lignes cherche à entraîner l'autre de son coté, vers la terre pour l'une ou en direction du ciel pour l'autre. Le conflit spatial, bien présent, peut s'expliquer ainsi. Dans une représentation du réel, un même tracé, ici celui de la ligne brisée, peut tout autant s'élever dans les airs que s'éloigner au sol. La raison en est que les deux dimensions du support (la feuille de papier) ne peuvent qu'échouer à rendre compte des trois dimensions du réel (le paysage). En l'absence de troisième dimension, le support se voit contraint d'attribuer deux rôles distincts et contradictoires à la hauteur dans l'image. Ainsi, cette hauteur géométrique peut tout autant exprimer l'éloignement dans la profondeur que la hauteur au-dessus du sol. Viola pourquoi vous en arrivez parfois à confondre ce qui s'élève et ce qui s'éloigne.

Mais, au-delà de cette faille structurelle de la représentation, cette image nous en apprend encore sur la diminution de taille. Car ici, le conflit de la hauteur et de la profondeur se voit renforcé et redoublé par celui de la diminution réelle et de la diminution apparente. Tandis que la largeur de la tige diminue réellement, la diminution de largeur de la route n'est qu'apparente. Ce deuxième conflit ne relève plus de la représentation, car celle-ci se contente de reproduire les informations données par notre système perceptif. Dans le réel, nous aurions face à cette route le même sentiment illusoire de diminution. Nous avons là une "faille" du système perceptif qui, plutôt que de nous informer de la taille réelle des éléments perçus, préfère nous donner une taille apparente correspondant à leur éloignement dans l'espace. Ainsi, en cette pauvre image, faite de bric et de broc, deux conflits se donnent la main pour essayer de nous tromper. Le premier inhérent à l'image représentée nous dit que deux formes, aux étagements plus ou moins identiques, doivent être à une même distance du spectateur. Le second propre à l'image perçue nous laisse entendre que deux formes, qui diminuent de manière conjointe, doivent s'éloigner d'un même pas du spectateur. Mais tandis que le premier conflit provient d'une faille de la représentation, le second repose sur un mécanisme de la perception.
DES CROQUIS POUR RENDRE COMPLIQUÉ CE QUI PARAISSAIT SIMPLE
La page 64 du carnet 1988-1989 est donc à l'origine du dessin présenté ci-dessus. 1. Pour que la confusion de la hauteur et de la profondeur soit parfaite, il aurait fallu que la fleur de ce premier croquis soit posée sur la ligne d'horizon. 2. Le croquis inférieur gauche est celui qui a été choisi 3. Pour que le croquis supérieur droit donne lieu à des développements intéressants, il faudrait pour le moins que l'éclair possède le même nombre tronçons que les routes. J'ai bien dit les routes, car ce qui était une fleur précédemment peut, en cette image, être compris comme un arbre au bout du chemin.

La page 30 du carnet 1990-1991 rend compte, à l'aide de simples blocs, du conflit de la hauteur et de la profondeur. Mais, afin de comprendre l'ambiguïté spatiale des trois premiers croquis, nous devrons commencer par le quatrième.

4. Le croquis inférieur droit met en scène deux colonnes de volumes. La colonne gauche, en raison des supports qui semblent collés à un mur, étagent les blocs les uns au dessus des autres. La colonne droite, qui présente des supports échelonnés dans la profondeur de l'espace, éloignent ses blocs les uns derrière les autres. Ainsi, bien que les blocs des deux colonnes soient de la même taille et qu'ils soient disposés en un parfait vis à vis, les uns semblent s'élever dans la hauteur de l'espace, tandis que les autres paraissent s'éloigner dans sa profondeur. Dans un cas, à gauche la diminution de taille exprimerait une diminution réelle, tandis que dans l'autre, à droite, cette même diminution ne serait qu'apparente. Tout cela est dit au conditionnel car tout peut encore se compliquer. Nous pourrions ainsi avoir à droite des supports décroissants portant des blocs décroissants étagés les uns au-dessus des autres en une verticale parfaite. Vision facilitée par l'alignement vertical des coins droits des supports et des arêtes droites des volumes. En revanche, je ne vois pas comment je pourrais échelonner la colonne gauche dans la profondeur de l'image, alors que cette disposition spatiale ne doit pas être impossible à réaliser. 1. Après avoir vu le quatrième croquis, vous pouvez maintenant comprendre que le croquis supérieur gauche propose au moins quatre dispositions spatiales différentes. Les deux suites de blocs peuvent toutes deux donner lieu à des colonnes verticales, ou échelonner toutes deux leurs volumes dans la profondeur de l'espace, ou bien encore, l'une peut jouer la hauteur tandis que l'autre marquera la profondeur. Mais, en raison de l'absence de diminution de taille et de l'alignement des arêtes verticales des volumes, je préfère voir ici des lévitations. 3. Le croquis supérieur droit, en ajoutant une diminution de taille régulière et progressive aux blocs en présence, peut faire pencher notre choix visuel vers la profondeur. Mais, l'alignement vertical des arêtes extérieures est toujours aussi prégnant. De plus, comme vous l'avez déjà certainement remarqué, ce croquis est identique au dernier croquis de la page, à la différence près que les supports des blocs ont ici été supprimés. 2. Le croquis inférieur gauche se contente d'ajouter du contact équivoque à l'alignement équivoque. Mais de même que l'alignement vertical n'est pas un indice sûr de l'étagement en hauteur des volumes, le contact équivoque des arêtes peut très bien exprimer une simple coïncidence : le contact illusoire d'un point de vue précis de blocs qui sont en réalité échelonnés dans la profondeur de l'espace.
La page 31 du carnet 1990-1991 peut paraître plus évidente que la précédente en ce qu'elle ne propose pas de multiples interprétations des échelonnements des blocs mais semble proposer, en chacun des croquis, une simple alternative de leurs orientations. C'est bien pour cela que nous allons démontrer le contraire.

1. Le croquis supérieur gauche se contente, par une tentative peu évidente de personnification, de placer les blocs les uns au-dessus des autres. 2. Le croquis inférieur gauche reprend les supports du quatrième croquis de la page précédente. Mais, cette fois, un seul support continu réunit les trois blocs de chaque colonne. Vous pourriez ainsi penser que l'orientation signifiée par ces supports enlève toute ambiguïté au croquis. Ainsi, les trois blocs de la colonne gauche, en étant disposés sur plan fuyant, présenteraient une apparente diminution de taille due à leur éloignement progressif, tandis que ceux de l'autre colonne, étagés sur un plan vertical offriraient une réelle diminution de taille. Cela est fort possible, de même que nous pourrions avoir à gauche un plan vertical trapézoïdal qui étagerait, lui aussi, des blocs décroissants les uns au-dessus des autres. 3. Le croquis supérieur droit raconte la même histoire visuelle que le précédent.
La page 28 du carnet 1995-2002 associe des contacts équivoque aux ambiguïtés d'échelonnements des pages précédentes. Rien de bien nouveau, si ce n'est qu'à accepter la réalité des contiguïtés entre les blocs et au sol, nous aurions là des figures dites et crues impossibles. De plus, avec cette page nous nous éloignons du sujet en ce que la diminution de taille n'a que très peu d'importance en ces croquis qui travaillent essentiellement le conflit de la hauteur et de la profondeur. C'est ainsi que ce dernier conflit peut très bien se passer de la problématique de la taille réelle et de la taille apparente pour apparaître dans une image.

PAGE PRÉCÉDENTE Comment la diminution s'adapte aux vues plongeantes PAGE SUIVANTE Des exemples de fausses diminutions en art et en images
RETOUR AU SOMMAIRE
RETOUR À L'ACCUEIL
|
|